Si vous n’avez pas vécu dans une grotte ces derniers mois, l’information n’a pas pu vous échapper : un nouvel opérateur de téléphonie mobile s’apprête à faire une entrée tonitruante sur le marché de la téléphonie mobile.
Ce dernier est attendu comme le messie par les consommateurs, tant les tarifs pratiqués par les opérateurs en place ont, longtemps, été abusifs. Ainsi, plus la date butoir avance, plus la presse et la blogosphère s’agitent pour dénicher des informations croustillantes sur ce nouvel entrant. Si je peux comprendre l’attente réelle des consommateurs pour Free Mobile (j’en fais d’ailleurs partie), j’ai, à de nombreuses reprises, été agacé par la course effrénée aux (faux) scoops des différents organes de presse. Récapitulons.
Alors, il sort quand, Free Mobile ?
Le sujet principal d’interrogation de ces dernières semaines, qui a fait couler beaucoup de pixels sur nos écrans, concerne la date de lancement de l’opérateur. Dès le départ, le fondateur de Free, Xavier Niel, s’était refusé à communiquer une date précise, en indiquant toutefois que l’opérateur serait lancé avant le 15 janvier. Une information que nous connaissions déjà par ailleurs, l’ARCEP ayant indiqué que « Free Mobile devrait ouvrir commercialement son réseau au plus tard le 12 janvier 2012 ». Cela n’a pourtant pas empêché la toile de s’émoustiller – et c’est un euphémisme – à chaque annonce de pseudo date de lancement.
Parmi les rumeurs les plus relayées, on retiendra notamment celles-ci (attention, cette liste est très loin d’être exhaustive) :
- Le 2 novembre, Electron Libre indique le lancement de l’offre de Free Mobile serait « imminent » ;
- Le jour suivant, le brooker Oddo pronostique, lui aussi, un lancement imminent ;
- Le même jour, le site Mac4ever précise disposer d’une source « très fiable » (sic) selon laquelle les offres de l’opérateur seraient lancées le 2 janvier 2012 ;
- Le 25 novembre, Emmanuel Torregano d’Electron Libre, nous signale sur Twitter que le lancement de Free Mobile se confirmerait pour le 19 décembre ;
- Autre rumeur, le 6 décembre, lorsque Challenges indique savoir, grâce à « une source très bien informée » (sic), que Free Mobile « démarrerait le 17 décembre ».
Une sélection de rumeurs loin d’être exhaustive, et qui pourtant, donne déjà le tournis. Toutes ces rumeurs s’avéreront fausses par la suite et auront pourtant été largement relayées par la blogosphère et la presse. Après cette avalanche de faux scoops, on pensait – à juste titre – que l’enthousiasme des journalistes serait échaudé. Que nenni !
Après une courte accalmie, le Nouvel Observateur remet le feu aux poudres le 2 janvier. Grâce à une nouvelle « une source anonyme proche du dossier » (sic), le journal estime que Free Mobile serait lancé la semaine du 2 au 6 janvier. Il n’en fallait pas moins relancer toute une série d’analyses très poussées prévoyant même un lancement le 6 janvier, à 13h37 précises.
Une fois de plus, beaucoup de bruit et de « ramdam » pour rien.
Et ça va coûter combien, Free Mobile ?
Heureusement pour nous, ces fameuses « sources bien informées » ont également été plus que prolixes en ce qui concerne les futurs forfaits et tarifs de l’opérateur de téléphonie mobile. Ces derniers mois, beaucoup de sites et de journaux ont ainsi publié les résultats de leurs investigations concernent les futurs tarifs proposés par Free.
On retiendra notamment, de manière non exhaustive, quelque unes de ces futures offres :
- Le site AndroidWorld lance les hostilités dès juillet, en évoquant des forfaits allant de 5.99€ à 29.99€, selon « une source » ;
- Mi-novembre, Le Figaro parle de forfaits allant de 9.99€ à 29.99€ en tout illimité ;
- Début décembre, un journaliste de Challenges, citant « une source très bien informée », indique que Free enverrait à ses clients une carte SIM gratuite entre le 17 et le 19 décembre ;
- Plus récemment, se basant sur une source plus que douteuse (la fameuse mamie du Cantal), de nombreux journalises annoncent un tarif de 15,99€ mensuels, pour une offre en tout illimité ;
- Il y a quelques jours, le site HTC-Hub diffuse pour sa part une infographie présentant des tarifs allant à 6.99€ à 14.99€ par mois pour du tout illimité. Une information qui sera largement rediffusée sur les médias sociaux.
Ici aussi, comme pour les dates de lancement, chacune des rumeurs sera largement reprise et diffusée sur la toile, qu’il s’agisse de médias sociaux tels que Twitter, de blogues ou de journaux spécialisés et généraux. Avec de la chance, une de ces (nombreuses) informations sera correcte !
Qui sème le vent…
La situation est certes symptomatique de l’énorme attente des internautes, mais pas que. En effet, dans cette cacophonie générale, on peut distinguer deux causes.
D’une part, la recherche effrénée au scoop et au « ramdam ». En publiant des informations provenant de sources peu fiables voire douteuses, beaucoup de sites et de journalistes ont souhaité se placer au cœur de l’événement, afin de faire parler d’eux. Pire, de nombreux blogueurs peu scrupuleux ont profité de la situation de crédulité générale et de confusion pour lancer des rumeurs qu’ils savaient pertinemment fausses, afin de récupérer et de bénéficier d’une partie du buzz entourant Free Mobile.
D’autre part, la plupart des sites ont rapidement compris que Free Mobile était un sujet fédérateur. Ainsi, colporter toutes les rumeurs sans s’assurer de leur fiabilité leur a permis de générer un trafic monstrueux sur leurs sites respectifs. Un moyen idéal, en période de crise, pour générer des visites facilement et augmenter ses revenus publicitaires. Il est d’ailleurs intéressant d’effectuer une recherche « Free Mobile » sur Google Actualités pour constater que certains sites et journaux ont publié, en moyenne, au moins un article par jour (avec du vent) au sujet du futur opérateur de téléphonie mobile. Mamie-Du-Cantal.com, avec ses publicités AdSense, surfe sur le buzz et illustre parfaitement cette situation. En même temps, si un sujet fonctionne et apporte du lectorat facilement, pourquoi s’en priver ?
Pour sa part, Free n’est pas blanc comme neige dans cette affaire. Le futur opérateur a volontairement tout fait pour entretenir le buzz en distillant avec parcimonie quelques os à ronger à la presse, à travers des piques prononcées par Xavier Niel contre ses concurrents, des messages codés et des pages cachées. En adoptant cette culture du secret digne d’Apple, Free s’est assuré une couverture médiatique énorme sans débourser un sou en publicité. À ses risques et périls cependant :
- Un certain nombre de potentiels clients commencent à se lasser de cette attente et de ce buzz à outrance, certains ayant fini par se réengager chez leur opérateur actuel.
- En laissant s’ébruiter toutes sortes de rumeurs toutes plus folles les unes que les autres, Free risque de faire des déçus. Par exemple, beaucoup de clients Freebox étaient persuadés qu’ils recevraient gratuitement une carte SIM au pied de leur sapin, la rumeur de Challenges ayant tellement été colportée qu’elle était considérée comme acquise. De la même façon, un grand nombre de consommateurs étaient déçus de ne pas avoir pu s’abonner chez Free Mobile avant Noël, nombreux étant les analystes ayant pronostiqué le lancement de Free Mobile avant les fêtes de fin d’année. Aussi, si l’opérateur de téléphonie mobile propose des tarifs supérieurs à ceux qui se sont ébruités sur la toile et qui sont désormais ancrés dans notre mémoire, le buzz risque de retomber comme un soufflet.
- En créant une telle attente, un faux pas de Free, tant d’un point de vue technique que commercial, aura un effet boule de neige aussi puissant que désastreux.
Bref, comme on dit : « qui sème le vent, récolte la tempête ».
Mise à jour du 09/01/2012
Le lancement de Free Mobile aura lieu demain, le 10 janvier, à 8h30. La présentation sera visionnable en direct sur la page live.free.fr/.